– d'un nouveau jour.
D'anciennes peaux qui tombent à l'eau,
Qui n'aspirent plus à s'aggriper
Mais se laissent enfin oublier, se rendent,
Et montent et redescendent
Au va-et-vient feutré de la lune.
La naissance d'un élan
Se faufilant contre-courant,
Un raz-de-marée encore endormi,
Une force encore
Occulte, éparpillée.
Un rayon de lumière sous-terrain
Retenant sa respiration
Pour ne pas être pointé du doigt.
Sous cet élan est un fleuve entier
Encore intracé.
Qui se cache dans les plis de la terre
Sous nos bottes.
Mais dans un sourire au coin des lèvres
Qui s'échappera, on y verra
Des îlots argentés.
Ou l'horizon des derniers pins
Des pyrénées.
Des gris vaseux, des poches d'air,
Des trous noirs entiers d'appétit.
Des poches de ciel.
Et les paumes de nos mains
Dans ce fleuve déborderont
D'envie comme les rives après
L'hiver, incapables de se contenir,
Cherchant, toujours,
L'autre.
Le chemin que tracera cette crue
Entre nos vignes, entre nos pommiers –
Le chemin qu'elle tracera entre
Les lignes de nos mains
Se verra de là-haut de la lune.
Parce que le flot dévalera
Et nous prendra nos magistères
Et nous rendra aux simples terres –
Et nous, nous prendrons peur
Depuis le bas-fond des vallées.
Mais nous serons sains et saufs,
Car l'inondation nous attendrira.
On se baignera nu dans ce débordement
Encore incompris, mais déjà bu,
Et on se ratera.
Puis on se rattrapera.
Et demain le raz-de-marée s'effacera
Comme le passé et comme le reste.
Ainsi, s'iront, petit à petit, les senteurs éparpillées
Du parfum de Maman. De la cour de récré.
Des chaussettes propres et pliées par les mains de grand-papa.
Des chardons bleus de l'Allondon, et des sapins géants du Jura.
Par tous les temps nous laisserons donc
Les parapluies fermés, (chez eux),
Préférant la tête froide et la peau qui colle,
Qui colle aux robes des nuages.
Un jour, la plante des pieds dans les ruisseaux,
Le vent bombé d'orage
Claquera les portes d'une raclée d'eau pour aviser
Qu'il n'est pas nôtre (et que nous ne sommes pas sien).
Que nous nous sommes vautrés de désir,
Égarés, lointains, noyés –
Mais nous ne sommes pas rien.
Les lampions seront éteints,
Et le vent se lèvera à l'aube et
Nous soulèvera de son zéphyr,
D'une main, et de l'autan, de l'autre.
Et nous... Nous saisirons ses longs draps
De poignées d'hommes, sachant qu'il ne soufflera peut-être
Pas deux fois. À notre tour donnant bras,
À notre tour portant l'espoir –
– De la naissance d'un nouveau jour.
Merci. À Marion, pour la photo argentique, pour les encouragements, pour notre correspondance… Ce poème ne serait jamais né sans toi. Et à Crozet, le petit village de mon enfance.